Aujourd’hui, 80% des hommes assistent à la naissance de leur enfant. Mais même si c’est devenu une norme, ce n’est pas un automatisme. Entre désir d’assister à ce moment unique, et pression du mythe du « bon père », comment se positionnent les papas ?Être présent à l’accouchement ne doit pas être ressenti comme un devoir par le père. Ce moment intense ne peut être vécu sainement à deux, que si l’envie est formulée par chacun. En pratique, nombreux sont les hommes qui décident d’assister à l’accouchement par convention ou pour faire plaisir à leur compagne… C’est un tort : La décision d’un homme de ne pas assister à ce moment ne veut absolument pas dire qu’il endossera mal son rôle par la suite. Faire les cent pas dans le couloir en attendant de rencontrer son bébé pour la première fois ne fait pas d’un homme un mauvais père en puissance !
Ce que veulent les hommes
Pour beaucoup d’hommes, la question ne se pose même pas : ils seront présents. « Quand j’ai suggéré qu’il aille chercher ma valise après après ma prise en charge à la maternité, il a rétorqué : « Hors de question que je te lâche une seule minute ! » », confie Carole, 32 ans, maman d’une petite Margaux de 2 ans. La jeune maman, qui accouchera de son deuxième enfant dans trois semaines, ajoute : « Là encore, on ne se pose même pas la question : le papa sera là du début à la fin, comme pour la première fois ».
Pour Valérie, 26 ans, la présence du papa est tout aussi importante. Ayant dû accoucher par césarienne, elle n’a pas pu compter sur lui : « J’aurais préféré qu’il soit à mes côtés, j’étais morte de trouille. Le jour où nous ferons le deuxième, c’est sûr, il assistera à l’accouchement. » Pour Mathieu, son conjoint, c’était également une vraie déception. « D’autant qu’il s’était préparé psychologiquement… », note Valérie.
Mais pour d’autres, ce n’est pas aussi évident. Angoissés, les papas ? Mal à l’aise avec le sang, effrayés par le dispositif médical… Dans ce cas, autant qu’ils s’abstiennent : rien n’est plus contagieux que le stress ! « Le père de ma fille a une sainte horreur du sang : il n’a pas voulu rester au moment crucial. », raconte Léa, 28 ans. « Il est resté en salle de travail juste avant, et est revenu une fois notre fille toute propre… Soit 45 minutes plus tard ! J’aurais vraiment voulu qu’il soit présent, mais c’était non négociable. Et si c’était pour le voir s’évanouir à côté de moi, heureusement qu’il n’est pas resté… »
Pour Léa, l’accouchement s’est très bien déroulé. Malgré l’envie de partager ce moment avec son conjoint, elle n’a pas réellement souffert de son absence. Et pour le papa, même pas mal : « Les sage-femmes ont même rangé tous les instruments avant de le laisser rentrer dans la pièce, pour être sur qu’il n’y avait plus la moindre trace de sang ! ».
Ce que veulent les femmes
Bien souvent, dans la tête des mères, pas de place pour le doute. L’accouchement est un moment magique et intense qu’elles ont envie de partager avec leur conjoint. C’est le cas de Céline, 26 ans, pour qui l’accouchement a été assez difficile. Pour elle, le soutien du papa était essentiel. « Il a fallut faire une prise de sang dans la tête de mon bébé alors que j’étais en salle de travail depuis déjà 48h, pour être sûre qu’il allait bien. Voir les sages-femmes arriver avec une seringue de 20 cm de long, c’est assez difficile… », confie-t-elle. « Heureusement qu’il était à mes côtés. »
Mais il y a aussi celles qui veulent garder cela pour elles. Exposer son corps, sa douleur dans de telles conditions… C’est quelque chose de très intime que certaines femmes ne veulent pas partager. C’est le cas de Lydia : « Je ne souhaitais pas qu’il soit à mes côtés pendant la poussée, parce que je ne voulais qu’il me voit en position de « faiblesse » ou de « souffrance », ni qu’il ne garde une image de moi toute dégoulinante de sueur, avec une tête pas possible, les cheveux en vrac… », admet-elle. « Je voulais rester belle, désirable à ses yeux. S’il avait été là, je me serais sentie gênée. »
Vanessa jeune maman d’un petit Evan de 10 mois, a elle aussi choisi d’être seule pour accoucher. « Je veux pouvoir être libre de mes réactions. C’est un moment très intime, je ne suis pas certaine que le papa y ait sa place : tant vis à vis de son impuissance à soulager sa femme dans la douleur que des aléas que peuvent réserver un accouchement. » Elle attend un deuxième petit garçon pour juillet, et sera à nouveau seule en salle de travail.
Faire naître la relation père-enfant
Il y a les pères qui s’impliquent dès le début de la grossesse : cours de préparation à la naissance, échographies, soutien moral H24, ils sont aux petits soins et vivent la grossesse en même temps que leur chère et tendre. Mais pour beaucoup, il est difficile de ne pas se sentir exclu de la relation fusionnelle qui lie la mère et son bébé.
Inclure le futur père pendant la grossesse est le premier pas vers une relation père-enfant, avant même l’accouchement. Rendre ce bébé moins « virtuel » est une nécessité pour un père qui reste par définition à l’extérieur de ce processus. La présence du père aux consultations gynécologiques, aux examens, aux échographies, est une première étape cruciale avant de se questionner sur sa présence à l’accouchement. Les cours préparatoires à la naissance sont également des moments importants pour qu’il trouve sa place dans cette grossesse et jusqu’à l’accouchement.
Pour en savoir plus sur ce sujet, voir aussi notre interview de Catherine Dumonteil-Kremer